Chapitre 10

 

 

Je restai pétrifiée, le regard rivé à l’autre bout de la salle, croyant à peine ce que je voyais. Malgré tous les défauts d’Adam, à aucun moment je ne l’aurais soupçonné de tromper Dom. Je reçus un coup de poignard dans le cœur à la place de ce dernier.

Je ne saurais dire ce qui lui fit lever la tête, juste un hasard ou une sorte d’instinct, mais Adam croisa mon regard. Quand il me reconnut, il écarquilla les yeux sous le choc et il s’immobilisa. Il baissa les épaules puis regarda vers le haut, quelque part au-dessus de mon épaule gauche.

Il m’était impossible de ne pas suivre son regard, même si c’était une ruse pour pouvoir quitter le club sans avoir à m’affronter.

Il n’essayait pas de me tendre un piège. Là-haut, sur le balcon dominant la piste de danse, Shae souriait d’un air suffisant. Je compris alors exactement pour quelle raison elle m’avait laissé entrer.

Shae coopérait avec Adam parce que, si elle ne le faisait pas, elle risquait d’être exécutée ou exorcisée, mais elle n’avait jamais caché à quel point cette situation lui déplaisait. Elle profiterait de n’importe quelle occasion pour le blesser, même si cela impliquait de blesser également Dominic. Peut-être même surtout si cela impliquait de blesser Dom… Il m’avait semblé, par le passé, qu’elle y prenait un grand plaisir.

Je détournai le regard et découvris que, loin d’avoir fui, Adam se frayait en fait un passage vers moi. J’étais déchirée entré mon envie de l’éviter et celle de l’enfoncer davantage. J’hésitais encore quand il s’arrêta devant moi.

Je ne l’avais jamais vu avec cet air… gêné, indécis, peut-être même vulnérable. Mais sachant dorénavant qu’il était capable d’arracher le cœur de Dom, je n’éprouvais pas la moindre pitié pour lui.

— Au risque de manquer d’originalité, me cria-t-il à l’oreille, la musique noyant presque ses paroles, ce n’est pas ce que tu crois.

Ça me démangeait de sortir mon Taser pour lui assener une bonne décharge dans un endroit bien vulnérable. Je parvins à me contenir, mais l’opinion que j’avais de lui devait se lire clairement sur mon visage.

Il détourna le regard.

— Au moins, écoute ce que j’ai à te dire avant de tirer tes propres conclusions, m’implora-t-il.

J’aurais aimé lui rétorquer de se carrer ses explications quelque part, mais peu importait ce que je pensais de lui, il allait faire partie de la cour de Lugh. Je devrais donc trouver un moyen de le tolérer même si je le détestais. Je fus incapable de me forcer à prononcer une parole aimable, mais je hochai la tête pour lui signifier que j’étais prête à l’écouter.

— Allons dans un endroit plus calme, cria-t-il.

Je ne répondis pas mais je le suivis quand il se dirigea vers la porte. Je dus attendre qu’il reprenne son arme auprès de la fille du vestiaire, ou peu importe ce qu’elle était, et bientôt nous nous retrouvâmes dehors dans l’air relativement frais.

Quitter le club, le bruit, la foule, les démons, était un vrai soulagement même si South Street était loin d’être déserte à cette heure de la nuit. Adam commença à descendre la rue et je lui emboîtai le pas, mécontente, tout en l’observant du coin de l’œil.

Contrairement à la plupart des habitués des 7 Péchés Capitaux, Adam ne s’habillait pas comme une effigie SM quand il venait. Il était vêtu d’un pantalon kaki classique, d’une chemise blanche et d’une veste en lin légère pour dissimuler son holster d’épaule. Les deux mains plantées dans les poches de son pantalon, il regardait fixement le trottoir devant lui.

Je retroussai la lèvre supérieure en un vilain rictus.

— Si ce n’était pas ce à quoi je pensais, pourquoi tu as l’air tellement coupable ?

Un muscle de sa mâchoire tressauta et je le vis déglutir avec peine.

— Je n’ai pas eu de relation sexuelle avec ce type, dit-il, les yeux toujours rivés sur le trottoir.

Mon éclat de rire tenait plus de l’aboiement.

— De la même façon que Bill Clinton n’a jamais eu de relation sexuelle avec cette autre femme ?

La colère embrasa son regard. Il devait se sentir vraiment minable pour ne pas s’en prendre à moi.

— Laisse-moi reformuler tout ça de façon plus claire : il ne s’est rien passé de sexuel entre lui et moi. Je ne vais pas en Enfer pour le sexe.

Je réfléchis à cette déclaration pendant un moment et pris conscience que je comprenais ce qu’il disait même s’il refusait de formuler précisément l’horrible vérité.

— Tu vas là-bas… pour prendre ton pied en torturant d’autres démons d’une façon que Dominic ne peut plus supporter maintenant… qu’il n’est plus possédé par Saul.

— Ça n’a rien à voir avec le sexe ! insista Adam, assez fort pour qu’un couple de passantes se retourne.

Adam croisa le regard de la fille la plus voyante et gronda en montrant les dents. La nana gothique baissa ses sourcils percés et détourna rapidement les yeux.

Une fois, j’avais permis à Adam de jouer avec moi et de satisfaire son désir de provoquer la douleur en échange de son aide pour sauver Brian. Je ne me rappelais que trop bien le contact de son corps collé contre mon dos pendant qu’il m’attachait les mains au-dessus de la tête.

— J’ai eu une expérience personnelle et rapprochée avec toi, rétorquai-je à mi-voix, pleine de colère. Je sais…

— Tu ne sais rien ! m’interrompit-il.

Je m’immobilisai, incapable de continuer à marcher comme si de rien n’était tout en me battant contre Adam et mes souvenirs sournois. Adam s’arrêta lui aussi et s’approcha très près de moi en baissant les yeux sur moi. Je lui répondis du même regard furieux.

— J’ai senti de quelle manière tu as réagi, pauvre con, dis-je en lui enfonçant l’index dans le torse pour ponctuer mes propos.

Il m’attrapa le poignet et le tordit douloureusement vers le bas. Je réprimai un cri de douleur, craignant qu’il n’apprécie que trop.

— Je te l’ai dit, c’était un réflexe conditionné, pas un véritable désir sexuel. Je ne suis pas intéressé par le fait de baiser avec quelqu’un d’autre que Dom.

La douleur commença à m’embuer les yeux tandis qu’il resserrait davantage sa main sur mon poignet, mais je ne cédai pas.

— Et est-ce que Dom penserait la même chose s’il savait ce que tu faisais ?

C’était bien de la culpabilité que j’avais lue dans son regard. Il me repoussa violemment. Mon dos percuta la grille métallique d’une vitrine de cartomancie et de conseil spirituel. Mes poumons se vidèrent d’un coup de leur air et mes genoux vacillèrent. Apparemment, c’était la semaine où je me faisais molester par mes prétendus alliés.

J’atterris le cul sur le trottoir dans un bruit sourd et un entrechoquement de dents. Pendant une demi-seconde, je crus que j’allais m’évanouir. Puis je parvins à remplir mes poumons d’air. Je compris que j’allais rester consciente et sentir les hématomes se former comme des champignons dans mon dos. Allaient-ils dessiner un losange identique au motif de la grille de fer ?

Adam adressa un autre de ses regards intimidants et furieux aux passants et, voyant que l’un d’eux refusait de comprendre, il sortit sa plaque. La foule se dispersa alors rapidement et Adam put concentrer de nouveau son attention sur moi. Il s’accroupit et je ne lus aucun regret dans ses yeux.

— Je te conseille de ne rien raconter à Dom, gronda-t-il. Il se peut qu’il comprenne. Mon hôte pense qu’il comprendra. Mais je ne tiens pas à prendre le risque de le blesser.

Je retins mon envie de lui demander ce qu’il comptait me faire si je parlais à Dom. Comme je l’avais appris d’après mon expérience personnelle, il était capable d’un certain nombre de choses atroces sans me tuer pour autant et, comme Lugh était en mesure de me soigner, Adam s’en sortirait probablement. J’affrontai son regard et lui posai une question qu’il avait toutes les raisons de considérer comme purement hypothétique.

— Et si tu pouvais trouver un moyen pour que Saul possède de nouveau Dom, est-ce que tu le ferais ?

— Non ! dit-il avec une rapidité qui me soulagea. J’aime bien Saul. C’est mon ami et ce, depuis des siècles. Nous avons passé de bons moments ensemble lors de nos passages sur la Plaine des Mortels et je le reverrai quand mon temps ici prendra fin. (Il déglutit.) Mais j’aime Dominic et lui ne m’attendra pas au Royaume des démons. Je ne veux pas prendre le risque de lui faire du mal. Cela n’a rien à voir avec le fait que je veuille couvrir mes arrières.

C’était bien la première fois que je voyais Adam aussi sincère. Il n’y avait plus aucun doute dans mon esprit : ce que je lisais dans ses yeux était bien de la vulnérabilité. La seule émotion forte que j’avais identifiée chez lui jusque-là avait été la rage. Il me révélait à présent une tout autre facette de sa personnalité que je n’étais pas certaine de vouloir connaître. Pas avec le message que Lugh m’avait chargée de délivrer.

Je laissai échapper un long soupir. Quand je repris la parole, ma voix était dénuée des accents catégoriques qui l’avaient jusque-là parasitée.

— On peut aller dans un endroit plus tranquille ? Il faut qu’on parle.

Adam cligna des yeux comme s’il était surpris par ce qui ressemblait à une reddition. Puis il acquiesça et se leva en me tendant la main pour m’aider. Redoutant qu’il serre ma main aussi fort qu’il venait de me comprimer le poignet, j’acceptai son offre et le laissai me remettre debout. Un coup d’œil vers la grille me révéla une empreinte de la taille de ma silhouette. J’avais apparemment de la chance de ne rien avoir de cassé.

Adam, les mains de nouveau dans les poches, continua à descendre la rue. Je n’avais pas d’autre option que de le suivre.

— Tu vas en parler à Dom ? me demanda-t-il.

Je soupirai bruyamment.

— Non.

Je n’avais pas plus envie qu’Adam de faire du mal à Dom. Il me coula un regard en coin.

— Tu es sûre ?

Je fus tentée de lui répondre « oui » du tac au tac, mais je savais exactement ce qu’il me demandait et c’était une question honnête. Non, je n’avais pas prévu de dire quoi que ce soit à Dominic. Mais parfois ma bouche avait tendance à agir selon sa propre volonté, particulièrement quand j’étais en colère. Était-il possible que quelque chose m’échappe ? J’avais le désagréable sentiment que oui.

— Tu devrais lui en parler toi-même, déclarai-je au lieu de répondre à sa question. Il peut l’apprendre autrement que par mon bavardage. Et ça te mettrait dans une posture bien pire que si tu lui annonçais toi-même.

Adam secoua la tête.

— Je ne peux pas.

Je haussai les épaules.

— Alors tu devrais peut-être cesser d’aller dans ce fichu club. Ça t’est déjà venu à l’esprit ?

Adam s’arrêta en face d’un salon de thé, puis il poussa la porte et me fit signe d’entrer. C’était un lieu comme un autre pour parler. Je le suivis.

L’endroit était agréable et calme, le silence uniquement perturbé par le cri de la machine à cappuccino. De la musique new age jouait doucement et, même si l’établissement était loin d’être désert, il n’était pas vraiment bondé non plus. La plupart des clients avaient l’air d’être des touristes, installés là pour un moment de pause avec une vue sur la folie de South Street.

Des tables étaient disposées au milieu du café tandis que des tabourets étaient alignés devant un long comptoir longeant l’un des murs. Chaque coin était agrémenté d’un agencement cosy de fauteuils. Adam et moi nous dirigeâmes vers un des emplacements libres.

— Qu’est-ce que tu veux ? me demanda-t-il en me montrant-la file d’attente devant le comptoir.

— Assieds-toi.

Il désigna une pancarte qui nous informait que les places assises étaient réservées aux clients, puis il me reposa la question. Il lui suffisait de sortir sa plaque pour que le personnel du café nous permette d’occuper des places assises sans commander quoi que ce soit, mais peut-être avions-nous tous les deux besoins de quelques minutes pour recouvrer nos esprits.

— Un café, dis-je enfin.

Quand je m’installai dans le fauteuil moelleux, mon dos m’informa que les hématomes étaient bien partis pour s’installer eux aussi.

Adam revint avant que je sois prête à l’affronter de nouveau, mais ça n’aurait rien changé s’il était revenu au bout d’une heure. Il posa mon café ainsi qu’une capsule de crème et deux sucres, sur la table entre nos fauteuils. D’après le parfum qui émanait de sa tasse, il buvait du thé à la menthe. C’était un choix étrange pour un dur à cuire comme lui, mais les boissons de chochottes que je commandais dans les bars étaient tout aussi étranges pour une dure à cuire avec un tatouage et les oreilles percées. Alors qui étais-je pour juger ?

Adam but une gorgée de son thé tandis que je commençais à siroter mon café. Quand j’eus fini, je m’enfonçai dans mon fauteuil – avec plus de précaution, cette fois – et j’attendis qu’il parle. Il ne fallut pas longtemps.

— Je ne veux pas faire de mal à Dom, dit-il, les yeux plongés dans son thé.

— Ouais, tu l’as déjà dit.

Mais il secoua la tête.

— Ce n’est pas ce que je veux dire. (Il leva la tête pour affronter mon regard.) Depuis le départ de Saul, j’ai compris que ce que nous avions fait ensemble a servi à plus d’un titre. C’était un plaisir sensuel, pour tous les deux. Mais j’ai également compris que c’était aussi un bon moyen pour moi de relâcher la pression. (Il détourna de nouveau les yeux.) Je dois faire tellement attention avec Dom, dit-il doucement, son souffle malmenant la vapeur qui s’élevait de sa tasse. Si je ne… peux pas me lâcher de temps en temps, j’ai peur de ce qui pourrait arriver.

— Merde, marmonnai-je en comprenant soudain où il voulait en venir. Tu penses vraiment que tu ferais du mal à Dominic si tu ne venais pas t’adonner à tes petits jeux au club ?

— Je ne sais pas. Je ne veux pas le savoir.

Je laissai échapper un long soupir. Adam n’était pas la personne que je préférais sur cette terre mais, dans ce cas précis, il me semblait qu’il était injuste envers lui-même.

— Loin de moi l’idée de suggérer que tu aies des qualités qui rachètent tes défauts, dis-je, mais s’il y a une chose que je sais te concernant, c’est que tu ne ferais jamais ça à Dom.

Il leva les yeux vers moi, de toute évidence abasourdi.

— Tu le penses vraiment ?

— Ouais, je le pense. Je pense aussi qu’il faut que tu parles à Dominic. Si tu peux me convaincre de te faciliter les choses, alors je suppose que tu en es capable aussi avec lui.

Adam éclata de rire et je vis presque ses épaules se soulager de leur charge. Je m’esclaffai aussi, mais pour des raisons différentes. Comme c’était ridicule qu’une personne comme moi donne des conseils relationnels à qui que ce soit, encore plus à un démon sadique !

— Tu as peut-être raison, admit Adam quand il cessa de rire. Je vais y réfléchir, je te le promets. Maintenant dis-moi ce que tu fichais aux 7 Péchés Capitaux.

— Bonne question, marmonnai-je avant de lui exposer le plan foireux que j’avais mis au point pour rencontrer Tommy.

J’avais bu la moitié de mon café quand je cessai de parler, mais la décharge de caféine ne donnait pas meilleure allure à mon plan.

Du coin de l’œil, je vis qu’Adam secouait la tête.

— Et qu’aurais-tu fait s’il avait avoué ?

Je m’agitai, mal à l’aise. Il avait mis le doigt sur le point faible de mon plan.

— C’est ce que je pensais, dit Adam avant de se pencher en avant pour attirer mon regard. Tu n’es pas flic. Tu n’es pas détective privé. Tu es une exorciste. Laisse ça aux professionnels, ma chérie.

Oui, il avait tout à fait raison, mais cela ne m’empêcha pas de me hérisser.

— C’est moi qui ai été engagée par Claudia Brewster, pas toi.

Oui, enfin, techniquement elle ne m’avait pas vraiment engagée. Je n’avais pas accepté d’argent de sa part.

Adam n’était pas du tout impressionné.

— Tu m’as fait part de cette affaire pour une raison précise et ce n’était pas parce que tu apprécies ma compagnie. Laisse-moi faire mon boulot, d’accord ?

J’aurais aimé le contredire si ce qu’il disait n’était pas marqué au coin du bon sens. Évidemment, étant donné ma nature, je n’allais pas non plus tomber d’accord avec lui. Je bus mon café pour éviter de parler.

— Tu as dit qu’il fallait que nous discutions, dit-il quand il devint évident que je comptais garder le silence sur ce sujet. De toute évidence, il ne s’agissait pas de ça, alors qu’est-ce qui se passe ?

Il avait déjà déclaré qu’il ne voulait pas que Saul revienne dans le corps de Dominic, mais quand je lui avais posé la question, il ne savait pas que c’était ce que Lugh souhaitait. Je croyais Lugh quand il affirmait qu’Adam était un bon petit soldat. Ce que son roi ordonnerait, Adam le ferait, peu importe que cela puisse le blesser, lui ou qui que ce soit d’autre.

Je savais que finalement je n’aurais pas d’autre choix que de confier à Adam ce que Lugh voulait que je lui demande. Mais je n’étais pas obligée d’obtempérer dans l’instant. Lugh m’infligea une petite migraine pour me faire savoir qu’il désapprouvait ma décision, mais ce ne fut qu’une douleur fugace. Quand il voulait vraiment exprimer son mécontentement, il pouvait m’infliger une douleur violente au point de me mettre à genoux.

— Peu importe, dis-je à Adam. Ce n’est pas urgent.

Il dut comprendre que je mentais mais ne chercha pas à en savoir plus. Je consultai ma montre et fus étonnée de découvrir qu’il était déjà 2 heures du matin. Je ne m’étais pas rendu compte que j’étais restée si longtemps dans ce fichu club ! Les vingt-quatre heures que Lugh m’avait accordées touchaient à leur fin, ce qui signifiait que si je ne parlais pas tout de suite à Adam, Lugh prendrait mon corps en otage la prochaine fois que je dormirais.

Je jetai un nouveau coup d’œil à Adam puis décidai qu’il était temps que je prenne un autre café.

Il m’adressa un drôle de regard quand je revins à la table avec ma tasse pleine. Malgré tous mes efforts, je n’ai toujours pas appris à cacher mes émotions. Il vit tout de suite que quelque chose clochait. Quelque chose d’autre que le fait qu’il ait trompé Dominic. Même si je comprenais pour quelle raison il le faisait, tant que Dom n’en savait rien, ça ressemblait tout de même à de la tromperie.

— Je suppose que tu n’as pas encore eu le temps de rendre visite à Sammy ? demandai-je, espérant que cela retarderait les questions qu’Adam serait tenté de poser.

Il haussa un sourcil. Il savait reconnaître une tactique de diversion. Heureusement, cette fois-ci, il décida de me laisser tranquille.

— Je suis passé à son bureau aujourd’hui et j’ai appris qu’il était en vacances. Je lui parlerai dès son retour. En attendant, je vais me concentrer sur Tommy. Je crois que je n’aurai aucun mal à passer un petit moment privé avec lui.

Il regarda sa tasse de thé qui devait être vide depuis au moins un quart d’heure. Ce n’était pas difficile de deviner de quoi il parlait et je réprimai une réaction de dégoût.

— Tu veux dire qu’il aime toutes ces conneries hardcore ? demandai-je tout en haussant le ton. Et tu vas tromper Dom avec ce type ? (J’avais parlé assez fort pour que quelques personnes se retournent vers moi.) Je préférerais que tu me laisses l’interroger, dis-je à voix plus basse.

Adam posa sa tasse et se pencha vers moi. La colère faisait scintiller ses yeux.

— Je ne trompe pas Dom, gronda-t-il. Et étant donné ton charmant caractère, Tommy risque de se braquer et d’avoir des soupçons en moins de cinq minutes. Si je l’emmène avec moi en Enfer, je peux le mettre dans un état où il ne pensera plus normalement. Et comme je suis officier de police, je peux faire le nécessaire s’il me confie ses secrets. Tu as fait ton devoir en me mettant au courant de cette affaire. Maintenant reste en dehors de tout ça comme une bonne petite exorciste que tu es et laisse-moi m’en occuper.

Je commençais à en avoir assez qu’on me dise de rester « en dehors de tout ça » mais, exceptionnellement, mon bon sens se manifesta à temps et je gardai cette pensée pour moi. Adam devait se douter que je ne tiendrais pas compte de son avertissement, mais discuter n’arrangerait pas mon cas.

— Soit, marmonnai-je en sirotant mon café. Tu retournes en Enfer. C’est là qu’est ta place de toute façon.

Je me levai, déterminée à faire une sortie théâtrale, quand Lugh m’envoya un coup de poignard dans l’œil. Je chancelai et faillis tomber la tête la première sur les genoux d’Adam mais ce dernier me rattrapa avec la rapidité du démon. Pendant un moment qui sembla durer une éternité, je plongeai mon regard dans ses yeux brun foncé, mon nez à quelques centimètres du sien. Je captai le parfum de l’après-rasage épicé qu’il affectionnait et, sous ce parfum, une senteur salée de brise marine. En dépit du fait que je le détestais, en dépit de ses habitudes sexuelles, en dépit du fait qu’il soit un démon, je devais admettre que c’était un spécimen de mâle sacrément sexy. Malgré moi, des images traversèrent mon esprit. Des images d’Adam, nu et excité, des images de lui avec Dom, des images de…

D’un mouvement vif, je m’écartai de lui et mis fin à cette digression avec toute la férocité dont j’étais capable. Je ne voulais pas penser à Adam de cette manière. J’étais déjà amoureuse de Brian et attirée par Lugh. Je n’avais pas besoin de complications supplémentaires.

Adam afficha un demi-sourire, mais ce n’était pas une jolie expression. Peu importe à quel point je refusais de l’admettre, Adam savait que je le trouvais attirant. J’avais le sentiment qu’il serait prêt à utiliser cette faiblesse contre moi s’il avait la moitié d’une chance.

Sachant que, quoi que je puisse dire, je ne ferais qu’aggraver la situation, je me contentai de secouer la tête avant de tourner les talons et de me diriger à grands pas vers la porte. Lugh m’assena un nouveau coup de poignard dans l’œil, mais ce ne fut qu’une brève contrariété. C’était de toute façon une bataille que je ne pouvais pas gagner. Peu importait la quantité de caféine que j’avais ingérée, je finirais par dormir et il prendrait le contrôle. Mais « plus tard » valait mieux que « maintenant ».

Je retournai vers le parking pour reprendre ma voiture en me demandant de quelle manière j’allais pouvoir m’occuper pendant les heures du petit matin.

Confiance Aveugle
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